Un pas de plus

Si l'on examine le terrain où se situe l'actuelle église de la ville, on voit qu'il forme une sorte de promontoire "au-dessus" du lac, au-dessus de l'ancien village de Champ (actuel cimetière) et, bien sûr, au-dessus du fond de vallée où coule la rivière Jamagne.

Eglise de Gérardmer au début du 20ème siècle
Sans le clocheton qui domine le Choeur

Si l'on regarde une carte géologique on voit qu'il se trouve proche de la sortie du cône de déjection d'un ancien torrent. Des relevés radiesthésiques, faits sur le secteur et dans l'église, semblent montrer, sous le chœur de celle-çi , un courant d'eau de faible importance, venant sans doute de plusieurs sources, encore actives, situées dans des propriétés familiales proches.

L'Association GE-AR permet donc d'évoquer un lieu (gé) dominant, relativement dégagé, exposé au soleil "RA" mais bien irrigué par une ou des sources "AR".

Il en est de même de l'association "GE-RA-AR" ou "GE-RAR" dans laquelle la racine "RA" est en relation avec une sorte de rhubarbe sauvage très florissante dans les lieux humides (en grec le fleuve Rha).

De plus, la racine "GR", qu'on retrouve dans tous les mots liés à la GeRmination, au GeRMe..., renvoie à un lieu élevé, proche d’une étendue d’eau, mais aussi à la triade initiale terre-eau-soleil nécessaire à une bonne production nourricière.

Il n'est pas inintéressant de noter que la racine celtique "GER" a pour sens taillis, broussailles... et que la commune de "GER" en Normandie fut de haute antiquité un site "potier". Nous y reviendrons plus loin.

Reste maintenant à examiner la racine MeR ou Me(a)iX qui est la troisième syllabe formant le nom de la ville. Rappelons d'abord qu'on dit GERARMé (avec élision du D et du R terminal) alors qu'on dit RETOURNEMER ou LONGEMER (prononcer le R final comme dans mer).

Il n'est donc pas interdit de penser que les syllabes "MeR" ou "Me(a)iX" sont une construction bien arrangeante afin de faire coller le nom de la ville avec celui de son fondateur supposé, Gérard d'Alsace, ou tout autre Gérard, ou avec la proximité du lac.

Il est vrai que, dans les vieux langages, "MeR" évoque l’eau, le marais (mor, muer, meur… moraine, tourbière (terre dont a été tiré Adam selon certaines traditions), lande…) l’étendue maritime et "M(e)aiX" la maison, la demeure. Tout ceci, même si un rapprochement avec une "demeure de l'eau" jouant sur la proximité MER-MA(e)IX paraît possible, ne semble pas piste prometteuse.

Notons ici que notre lac n'existe que parce qu'il est fermé vers l'ouest par la MoRaine formée par les dépôts d'un ancien glacier disparu.

On a vu précédemment que l'orthographe du nom fut longue à se fixer. Il faut en effet attendre les 18-19ème siècles pour que la forme actuelle soit à peu près unanimement adoptée par tous les scripteurs, alors que, la prononciation locale maintient, de nos jours encore, la forme GE-RAR-Mé.

Jusqu'à cette date, c'est la forme "G.R.M" - prononcez GéRaMé, GéRoMé, GéRoMois - qui parait dominante, avec en 1564 une terminaison latine très intéressante GérardMAIE, qu'on trouve dans une série poétique illustrant une carte de Mercator, qui évoque immédiatement la forme MAI, MAÏA, ARMAÏA.

Or "MAÏA" est fille d’Atlas (qui porte le ciel comme semblent le faire les monts environnants). Elle est l’aînée des Pléïades et la mère de Mercure ou d’Hermès, le dieu des secrets, des voleurs et des marchands.

Atlas est l’un des Titans, eux-mêmes fils d’Ouranos (le ciel) et de Gaïa (la terre), dont on dit qu’ils se seraient réfugiés, avec leur mère Persephone/Proserpine (le grain, le GeRMe qui renaît sans cesse), dans un pays dénommé "la Voge" et, peut-être, selon les légendes locales, à la "Glacière du Kertoff".

Ce lieu est en effet porteur d'une légende qui fait intervenir une vieille femme, très laide, ensorceleuse de beaux chevaliers qu'elle retient dans son palais de glace.

Nous sommes peut être ici devant une survivance de la légende celtique de la "Vieille Morte" qui n'est rien d'autre que "Mara" la mère primitive?

Cette vieille racine "Mar" entre dans de nombreux toponymes et noms en relation avec l'eau (mare...), la terre (marne...), la mère (marraine, marâtre...), voire la "MoRt".

On la retrouve aussi dans divers prénoms comme "Marguerite" qui vient du latin "Margarita" et du grec "Margaris" qui signifie "la perle". Et notre ville n'est-elle pas nommée "La Perle des Vosges"?

Une perle n'est-ce pas une "eau" devenant pierre? En héraldique la perle a pour couleur le métal "argent", la couleur "blanche", et elle s'écrit comme le mot "PaRoLe". Serait-ce ici la parole créatrice, fécondante, "le Verbe"? Et ce Verbe n'est-il pas traditionnellement l'Enfant Jésus porté, à la hanche ou sur les genoux par sa Mère, la Vierge Marie?

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